Le 500e anniversaire de Théodore de Bèze
Méditation en forme d'évocation de la vie de Théodore de Bèze par Alain Pangrazi
Il y a 500 ans naissait à Vézelay, en Bourgogne, le grand théologien protestant Théodore de Bèze.
Trésorier de la Paroisse et natif moi aussi de l’Yonne, je ne peux pas manquer l’occasion d’évoquer celui qui fit un sermon dans l’Eglise St Jean à Caen le 15 mars 1563 sur « l'utilité de l'argent, qui est nerf de la guerre ».
L’humaniste
Contrairement à Calvin, Théodore de Bèze n’a jamais renié son estime et son admiration pour Rabelais et en particulier la tradition joyeuse et l’invention verbale. Théodore de Bèze n’acceptait pas sans réserves tous les points de vue d’Erasme mais il en reprenait des expressions ou des proverbes issus des « Adages » ou de « l’Eloge de la folie ». Par contre Bèze était bien plus proche de l’esprit d’Ulrich Von Hutten dont il louait les dons et la «plaisante adresse à la poésie». Théodore de Bèze était un polémiste qui voulait faire progresser la reconnaissance de la valeur de l’intelligence chez chaque individu.
Il revendiquait la souveraineté du peuple représenté par les États-Généraux. C’était donc un démocrate dans toute la modernité du terme.
Le théologien
Voici un extrait de son Testament rédigé en 1595
« Il me serait impossible de réciter les grandes assistances que j’ai senties du Seigneur en toutes sortes de charges, non seulement, par trop pesantes, mais aussi par trop périlleuses jusques à ce que étant de retour en ce lieu [Genève] il m’a fait cette grâce jusques à présent de n’avoir été sans édification tant de bouche que par écrit, selon qu’il a plu à Dieu m’y conduire; mais hélas, faisant comparaison de son devoir avec ce peu d’effet, je baisse la tête devant Dieu lui demandant grâce et miséricorde. »
Comment ne pas mentionner qu’il fut le président du synode de la Rochelle en 1571 qui donna la Confession de foi de La Rochelle qui est reste un texte de référence des Églises réformées de France.
Il fut le continuateur de Jean Calvin et il défendit les droits et l’indépendance de la puissance spirituelle mais en lui donnant une importance relative pour permettre une bonne entente entre les clercs et les fidèles.
Il fut aussi le continuateur de Clément Marot car il termina la transposition des Psaumes en français.
Son héritage
Il a montré qu’on pouvait concilier l’héritage humaniste et la conscience chrétienne.
Il était le chef incontesté de la cause réformée dans toute l’Europe.
Il laisse une œuvre immense et variée de 90 ouvrages dont une correspondance très importante qui en représente 26 volumes.
Il chercha toujours à fédérer les particularismes nationaux et pourrait être assimilé à un véritable militant d’une Europe unie.
Théodore de Bèze est mort à Genève à 86 ans. Plutôt que de le citer, car le choix est ardu, voici la convocation par le recteur de l’Académie fondée par Jean Calvin auquel Théodore de Bèze succéda :
« Telle est l’arrivée au port pour les navigateurs, telle l’entrée dans une autre vie pour ceux dont la mort est précieuse aux yeux du Seigneur. La journée d’hier a vu s’éteindre une grande lumière de l’Eglise. Chargé d’années, noble et spectable(*), Théodore de Bèze vient de s’acquitter de cette vie éphémère et misérable pour entrer paisiblement dans celle où l’on trouve le repos et la félicité éternelle. Aujourd’hui auront lieu ses obsèques. C’est pourquoi, illustres et généreux seigneurs, comtes, barons, nobles et étudiants de toute condition appartenant à cette Académie, au nom des pasteurs et professeurs, nous vous convoquons pour l’heure de midi, afin de prendre part au convoi funèbre et de rendre l’honneur suprême dû à cet homme éminent, à cette mort sainte. Son corps a été semé corruptible, ainsi que celui de tous ceux qui meurent en Christ, il ressuscitera incorruptible. Car ni la mort ni la vie ne nous peuvent priver des bienfaits de cet amour que Dieu témoigne à ceux qui sont à lui en notre Seigneur Jésus-Christ, lequel fait passer les siens de la mort à la vie. »
(*) Ici dans le sens de titulaire de diplômes de haut niveau.